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  • Photo du rédacteurMatteo Satta

Prato, redonner aux citoyens le contrôle de leurs données

Prato est une ville, aux alentours de Florence, bien connue en Italie avec ses quelques 200 000 habitants. Son identité est fortement liée à son pôle textile et à l'immense communauté chinoise, qui en a fait l'une des villes les plus florissantes d'Italie au cours des années 60 et 80, au moment du boom économique italien qui reposait sur les villes de taille moyenne et l’industrie textile.


En raison de la crise de ce secteur, lorsque les entreprises ont commencé à investir en Extrême-Orient, Prato a dû trouver de nouvelles solutions.


A la suite de cette transformation, à la fin des années 90, la ville a mis en place des projets européens, plus particulièrement des projets pilotes, dans le cadre de programmes comme le CIP. Elle est, aujourd’hui, forte d'une expérience importante dans des projets cofinancés par la Commission européenne et qui, au cours de ces dix dernières années, sont surtout liés aux données.


Récemment, Prato a travaillé avec un projet important appelé ROUTE-TO-PA, pour impliquer davantage de citoyens dans leur stratégie de données ouvertes, et aujourd'hui elle investit fortement dans un nouveau projet européen appelé DataVaults.


Copyright: © APT di Prato


Les données personnelles ont été un sujet de discussion majeur ces dernières années, en raison des nouvelles réglementations dans l'Union européenne et de la percée des grands acteurs qui ont commencé à recueillir des données personnelles à des fins de marketing et commerciales.

De nombreuses initiatives de protection des données ont été lancées, souvent appelées «anti-google» ou «anti-facebook», car elles sont , en quelque sorte, considérées comme emblématiques de cette exploitation commerciale ; à titre d’exemple Qwant, qui a été adopté par certaines autorités publiques comme Issy-les-Moulineaux et le département des Hauts de Seine en France.

Ces initiatives sont souvent « ponctuelles » et il n'y a pas de véritable méthode ni de stratégie à long terme, à cause d’un manque de stratégie au niveau national et communautaire.

Datavaults, un projet cofinancé par la Commission européenne dans le cadre du programme Horizon 2020, vise à répondre aux préoccupations de plus en plus grandes en matière de confidentialité, permettant aux individus de s'approprier et de contrôler leurs données et de les partager.

L’un des principaux promoteurs du succès de Prato au niveau européen est Paolo Boscolo, directeur informatique de la ville et responsable informatique de l'ONG Major Cities of Europe, qui a commencé à renforcer la présence de la ville en Europe il y a environ 20 ans.

Paolo, manager à la fois de ROUTE-TO-PA et DataVaults, a accepté d'échanger quelques mots avec nous sur sa participation à des projets européens et plus précisément de ce dernier projet, son évolution et les résultats attendus à Prato.


Pouvez-vous nous expliquer votre histoire dans les projets européens ?

Au début, nous avions l'habitude de coordonner les projets, 4 d'entre eux, principalement dans des programmes comme CIP et COMPACT. Notre stratégie était d'utiliser des plateformes ou des outils déjà existants et de travailler à les déployer ici, en les combinant également avec d'autres solutions utilisées ailleurs. Il nous a été vraiment utile de travailler de cette manière. Aujourd'hui, c'est plus compliqué car souvent les projets sont plus R&D, alors on peut expérimenter, mais les solutions ne restent souvent pas en place à la fin du projet, alors que les solutions résultant de ces 4 projets sont toujours là 15 ans plus tard. Un exemple récent de réussite est ROUTE-TO-PA, car nous utilisons ici certains composants. Ce succès est dû à la plateforme, qui existait déjà et qui aurait de toute façon été financée. Les meilleurs projets sont ceux qui peuvent exister même sans financement de l'UE.


Vous avez évoqué certaines difficultés avec les nouveaux programmes, mais vous continuez à travailler sur les projets, quel est votre avantage aujourd'hui ?

Il y a un double avantage, d'un côté la ville teste les solutions, il est utile d'avoir son mot à dire (et de voir) ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. En même temps, il y a un avantage pour les entreprises, qui peuvent savoir, après de vrais tests, comment concevoir leurs produits, et pour les citoyens, qui , ainsi, peuvent bénéficier de services et de produits correspondant à leurs besoins.


Parlons de DataVaults, pouvez-vous nous expliquer ce projet de la manière la plus simple possible ?

DataVaults veut changer le « business model » autour des données personnelles, pour redonner aux individus le contrôle des données et avoir des avantages financiers. Le modèle d'aujourd'hui est basé sur le « vol » des données personnelles des particuliers pour les revendre aux villes. Ce principe est tout à fait inacceptable car il est injuste. Un exemple concret est lié à un grand groupe comme Mastercard, qui donne des cartes de crédit gratuitement, mais en échange, obtient les données gratuitement. Ces données, extrêmement poussées (localisation, type d'achats…), sont ensuite vendues aux villes, puis le client pense avoir les données gratuitement, mais il les paie grâce aux taxes locales. C'est un modèle commercial injuste. En même temps, les citoyens acceptent souvent de céder des données à des entreprises privées, mais pas aux villes, et c'est absurde.

Donc, les villes sont des « chercheurs de données » et le projet a pour ambition de créer une plateforme dans laquelle un citoyen peut introduire ses données. Cela présenterait des avantages pour tout le monde, mais pas pour les grandes entreprises de données. Cela permettrait de mettre à disposition de la ville (client) des données qu'elle n’aurait pas, en laissant le citoyen contrôler ces données et lui permettant ainsi d’ être rémunéré. Le fournisseur de plate-forme aurait sa rémunération aussi.


De quoi parle le pilote de Prato ?

Prato travaille sur un double pilote, d'un côté il aimerait rendre facilement accessibles les certificats d’état civil (naissance, mariage etc..), en évitant de demander les raisons de l'utilisation, comme c'est le cas aujourd'hui, également pour la conformité au RGPD, de l'autre il aimerait tester la collecte de données personnelles des citoyens / touristes comme la position, le parcours de déplacement dans la ville, la participation à différents événements, les données de profil. Cela permettrait de réaliser des analyses de l’exploitation du service et d'améliorer l'offre associée, tout en offrant ces mêmes informations aux opérateurs commerciaux prêts à payer pour accéder à ce type de données massives.


Quand cela arrivera-t-il ?

Le pilote se déroulera entre la seconde moitié de 2021 et la fin de 2022. Le projet se terminera pendant les premiers mois de 2023.


Ce projet sera couronné de succès pour Prato si…

Je ne considère pas ce projet comme une solution immédiate au problème des données, mais je pense que ce sera un réel succès s’il prouve qu’une plate-forme de ce type peut fonctionner. Cela donnera des indications à la commission pour qu'elle élabore les bonnes politiques pour l'avenir et pour briser ce modèle économique injuste. Tous les pays, y compris l'UE avec de nombreuses initiatives, vont dans cette direction, mais nous ne savons pas (encore) comment agir. C’est là que DataVaults doit intervenir.


Vous trouvez de suite une autre interview (anglais) de Paolo Boscolo, faite par Giorgio Prister, président de Major Cities of Europe.

L'article est disponible aussi en anglais.

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